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lundi, mars 17, 2003

Tragique destin d'une famille
[2003-03-17 - 06:00]

Les jur�s de la cour d'assises de Bruxelles sont appel�s � se plonger, d�s ce matin, dans l'une des intrigues criminelles les plus �tranges qu'ait connu la capitale. Au terme de trois semaines de d�bats, ils devront d�cider si le destin tragique de la famille Garti-Malaki (quatre assassinats en sept ans) fut trac�, comme le pense l'accusation, par un tueur machiav�lique ou si, comme le soutient l'accus�, Mohammed Lahboubi, il r�sulta d'une vengeance de trafiquants de drogues italiens et marocains.

1- Premier acte. Le premier acte de cette saga criminelle riche en rebondissements se joue en ao�t 1985. Mohammed Garti Malaki, 58�ans, le patriarche de cette famille originaire du Rif marocain, dispara�t. Dans la nuit du 1er au 2 septembre, un taximan remet une lettre � sa famille. Elle indique que le corps de Mohammed se trouve dans un immeuble abandonn� situ� au 218 de la rue d'Aerschot. Son fils Abdelkader et son neveu se pr�cipitent � l'endroit d�sign�. Le corps d�compos� de Mohammed g�t dans la cave. L'enqu�te r�v�le que le patriarche �tait impliqu� dans un vaste trafic de stup�fiants entre le Maroc et la Belgique. Il aurait n�glig� de payer aux trafiquants le produit d'une vente de 36 kilos de haschich. De nombreuses lettres anonymes - l'affirment. Mohammed Lahboubi, le beau-fils de Mohammed Garti Malaki, et les membres de la famille soutiennent cette hypoth�se. Ils d�signent un trafiquant qui sera arr�t�. Le taximan croit reconna�tre en lui le jeune homme qui lui avait remis la lettre r�v�lant l'assassinat du patriarche.

2- Deuxi�me acte. Le deuxi�me acte se joue moins de deux ans plus tard. Le 11�mars 1987, des ouvriers de la SNCB d�couvrent sur le talus de chemin de fer qui borde la rue Chaudron, � Anderlecht, les corps d'un homme et d'une femme. L'un et l'autre ont �t� �gorg�s. Les assassins de Na�m Garti Malaki, la fille du patriarche assassin�, et de son mari Abdellah Ouriaghli Boudoukane leur ont inflig� ��le sourire kabyle��, cet �gorgement qui signe une vengeance de la p�gre marocaine. A nouveau des lettres anonymes parviennent � la police. Les d�clarations de Mohammed Lahboubi et d'autres membres de la famille, renvoient une nouvelle fois � des trafiquants de drogue. Abdellah Ouriaghli, en cheville avec des trafiquants italiens, aurait d�tourn� 50 kilos de haschich. La th�se de la vengeance li�e au milieu est privil�gi�e.

- 3- Troisi�me acte. Le troisi�me acte de l'intrigue se d�roule le 19 mai 1992. Khadija Garti Malaki, l'�pouse de Mohammed Lahboubi, dispara�t de leur domicile schaerbeekois. L'�poux signale, d�s le lendemain, sa disparition � la police. Il explique que sa femme �tait d�pressive suite � la naissance d'un quatri�me enfant handicap�, qu'elle avait d�j� menac� de se jeter dans le canal. La piste d'une vengeance de trafiquants de drogue est envisag�e. Cinq jours plus tard, � Lives-sur-Meuse, le corps d'une femme, entrav� et enferm� dans un sac, est remont� du fleuve. Un avis de recherche est diffus�. Le gendarme Th�o Vandyck, qui enqu�te sur les assassinats commis au sein de la famille depuis 1985 et qui se liera d'amiti� avec Mohammed Lahboubi, se rend � la morgue de Namur. Le corps, se dit-il, est peut-�tre celui de Khadija. Ni le gendarme ni Mohammed Lahboubi ne reconnaissent cependant l'�pouse disparue. A la sortie de la morgue, Lahboubi pense sans doute que l'enqu�te n'ira pas plus loin. On apprendra plus tard que Vandyck tuyautait son ami sur l'�volution de l'enqu�te. L'ex-gendarme sera d'ailleurs inculp� de violation du secret professionnel.
En d�cembre 1998, le juge d'instruction namurois Com�liau d�cide de tenter une derni�re fois d'identifier la myst�rieuse jeune femme retrouv�e dans la Meuse six ans plus t�t. L'�mission ��Appel � t�moins�� diffuse son portrait. Ce jour-l�, le gendarme de la BSR Philippe Pourbaix est devant son poste de t�l�vision. Il sursaute�: il croit reconna�tre l'une des filles de Mohammed Garti-Malaki qu'il a rencontr�e alors qu'il participait � l'enqu�te sur les trois premiers assassinats.
La machine judiciaire est relanc�e. Une relecture de l'ensemble des dossiers et de nouvelles expertises r�v�lent que la quasi-totalit� des lettres anonymes ayant fond� la piste d'une ��vengeance de trafiquants de drogues�� fut sans doute �crite, post�e ou dict�e par Mohammed Lahboubi, dont les empreintes g�n�tiques se retrouvent sur les timbres ou la colle des rabats des enveloppes. Son emploi du temps le jour des crimes est revisit�. Il pr�sente de nombreuses failles. Et le t�moin en compagnie duquel il pr�tendait se trouver le jour de la disparition de Khadija reviendra sur ses d�clarations. Cet homme d'origine italienne avouera aux enqu�teurs avoir particip� � l'enl�vement du corps de la jeune femme et l'avoir convoy�, en compagnie de Lahboubi, jusqu'� Lives-sur-Meuse. Lahboubi compte bien prouver son innocence au cours de ce proc�s hors du commun. Il maintient sa certitude�: les Garti-Malaki ont �t� les victimes de trafiquants de drogues. L'accusation, pour sa part, apporte des �l�ments confondants. Mais une pi�ce ma�tresse manque � ce puzzle criminel patiemment reconstitu� par les enqu�teurs�: quels auraient �t� les mobiles de l'accus� pour s'en prendre successivement avec autant d'acharnement � son beau-p�re, son beau-fr�re et sa belle-s�ur et sa propre �pouse�?